L'offensive ukrainienne sur Koursk, trois leçons amères pour le Kremlin

 

par Fulvio Scaglione

source : https://it.insideover.com/guerra/loffensiva-ucraina-su-kursk-tre-lezioni-amare-per-il-cremlino.html

8 août 2024

L'offensive que les troupes ukrainiennes ont lancée dans la zone limitrophe de la région russe de Koursk, par le nombre d'hommes et de véhicules blindés qu'elle a employés, n'est certainement pas une opération improvisée. Bien au contraire. L'avancée des Ukrainiens semble déjà bloquée, après la conquête de quelques villages proches de la frontière (Sudzha et Korenevo les plus importants), et il est probable que la réaction russe les contraindra tôt ou tard à battre en retraite, même si les nouvelles du front parlent déjà de retranchements, dans l'attente évidente d'une bataille destinée à durer.

Au-delà du résultat, il est cependant déjà possible de tirer quelques conclusions des événements des deux derniers jours.

Les réserves : les commandos ukrainiens auraient lancé l'équivalent de deux brigades à l'assaut. Les Russes eux-mêmes confirment quelque peu l'ampleur de l'assaut en affirmant avoir éliminé, parmi les morts et les blessés, 660 soldats ukrainiens et détruit 82 véhicules blindés ennemis. Quelle que soit la vérité des chiffres (qui fluctuent au gré de la propagande adverse), il reste évident que les commandements ukrainiens sont toujours en mesure de mobiliser un nombre suffisant d'hommes pour des opérations de grande envergure. D'autant plus s'il est vrai que l'artillerie et l'aviation russes tentent de frapper les unités de réserve ukrainiennes dans la région (ukrainienne) de Samy pour les empêcher de rejoindre l'avant-garde entrée en territoire russe. Cela confirme ce que tout le monde observe depuis quelques mois, à savoir que les Russes avancent dans les régions de Donetsk et de Lougansk mais le font très lentement pour ne pas perdre trop d'hommes dans des assauts insensés sur des positions bien fortifiées. Poutine lui-même l'a dit : "Nous pourrions tout faire plus vite, mais les vies humaines sont trop importantes". 

La surprise : les défenses russes dans la région de Koursk ont été prises par surprise, c'est évident. Le fait est d'autant plus remarquable que Koursk, grand centre industriel de près de 500 000 habitants, n'est qu'à un peu plus de 200 kilomètres de Kharkiv, la deuxième ville d'Ukraine, et se trouve depuis longtemps dans le collimateur des drones de Kiev. En outre, à une courte distance de Koursk et à une distance similaire de la frontière ukrainienne, se trouve la ville de Kourtchatov (du nom du scientifique Igor Kourtchatov, directeur du programme atomique soviétique à partir de 1942 et considéré comme le "père" de la première bombe atomique de l'URSS), où se trouve une grande centrale nucléaire russe dotée de quatre réacteurs en activité. Il est difficile de déterminer si les troupes ukrainiennes pensaient réellement pouvoir s'enfoncer aussi profondément dans le territoire russe, mais ce qui est certain, c'est que les précautions prises du côté russe ont dû être plus importantes. Ce n'est pas une bonne page pour Andrej Belousov, ministre de la Défense depuis quelques mois à la place de Sergei Shoigu. Economiste de formation, réputé pour son honnêteté absolue, Belousov a été nommé à ce poste pour rationaliser l'utilisation des énormes ressources (6% du PIB) que le Kremlin consacre à la Défense. Mais cela n'exclut pas que la tâche première de son ministère soit de gagner la guerre, et non d'être pris par surprise dans une région cruciale.

L'aide : Oleksandr Syrsky, le général que le président Zelensky a voulu placer à la tête des forces armées après avoir torpillé le très célèbre général Zaluzhny, a publiquement remercié le commandement de l'OTAN pour l'Europe pour l'aide et la coopération apportées dans cette opération sur Koursk. Il ne s'agit pas d'une question d'armes (celles-ci sont arrivées depuis des années, et les F-16 nouvellement fournis n'ont pas participé), et encore moins d'hommes. En revanche, il est confirmé que l'un des principaux soutiens dont Kiev peut bénéficier est le renseignement aérien et satellitaire occidental. Comme lors de la contre-offensive de l'automne 2022 et des opérations en mer Noire, les drones et les satellites de l'OTAN parviennent à découvrir les "trous" dans le très long déploiement russe (qui s'étend sur plus de 1 700 kilomètres) et à indiquer aux Ukrainiens les points les plus faibles ou non couverts. Un problème auquel les Russes n'ont pas encore réussi à remédier. Une faille importante : on se demande comment ils n'ont pas remarqué que les commandants ukrainiens rassemblaient des brigades entières près de la frontière, dans la région de Koursk. Une telle quantité d'hommes et de moyens qu'ils ont été capables d'occuper 350 kilomètres carrés de territoire russe en deux jours. Si ce n'est que les hauts responsables du ministère de la défense viennent d'être frappés par une purge totale, on peut s'attendre à voir tomber quelques têtes importantes dans les semaines à venir.

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