Trump, Taïwan et ce formidable quid pro quo pour défendre le dollar.

 

par Alessandro Volpi

source : https://altreconomia.it/trump-taiwan-e-quella-formidabile-contropartita-per-difendere-il-dollaro/

22 juillet 2024

L'ancien président a déclaré que les États-Unis pourraient renoncer à défendre Taïwan contre une invasion chinoise. Derrière cette option, médiatisée par le retrait de Joe Biden, il y aurait un accord tacite avec Pékin pour maintenir le dollar comme monnaie dominante, affaiblissant les "big tech" et les grandes fortunes et favorisant ainsi les "alliés" de l'ancien président, Elon Musk en tête.

Le discours de Donald Trump et les déclarations de son second James Vance sur Taïwan revêtent une importance considérable. En pratique, Trump, l'adversaire le plus farouche de la Chine lors de sa précédente présidence, affirme, presque sans y penser, que les États-Unis pourraient renoncer à défendre Taïwan et ouvrir ainsi la porte à une "conquête" chinoise. Il s'agit là d'une position d'un poids gigantesque. Que se cache-t-il derrière une telle affirmation ? Deux éléments peuvent nous aider à y voir plus clair.

Le premier. Trump veut ramener aux États-Unis des pans entiers de la production américaine : en substance, une réindustrialisation. Pour ce faire, des financements du reste du monde sont nécessaires pour acheter la dette américaine, et la dollarisation ne doit donc en aucun cas être remise en cause. La Chine est le pivot de la dollarisation, car environ un tiers du commerce mondial concerne des biens et des services chinois. La décision de la Chine de se désengager du dollar signifierait donc la fin de la dollarisation et la possibilité pour les États-Unis de ne pas dépendre uniquement de Wall Street. 

Permettre à la Chine de s'emparer de Taïwan, c'est désormais offrir à l'ancien Empire céleste une formidable contrepartie au maintien de la dollarisation. Un Taïwan chinois signifie que les principaux et vitaux fournisseurs de la big tech américaine seront chinois : Nvidia, Apple, Microsoft et Alphabet dépendront de fournisseurs chinois.

Mais il y a un deuxième élément pertinent. Si les big tech dépendent de la Chine parce que la présidence américaine a décidé de favoriser la prise de contrôle de Taïwan par les Chinois, il est clair que le pouvoir politique américain va reprendre un rôle dans le monde de la super-finance, et que les groupes proches de Trump, d'Elon Musk aux nombreux amis de James Vance, pourront conditionner les "Big Three", aujourd'hui, au contraire, omnipotents. Autrement dit, la gigantesque bulle financière gérée par BlackRock, Vanguard et State Street risquerait de se dégonfler immédiatement si la Chine décidait de bloquer les approvisionnements des géants dont les trois fonds sont actionnaires. Ainsi, Trump et la finance qui lui est proche auront les moyens de conditionner Larry Fink, Jamie Dimon et consorts en les obligeant à ne jamais les exclure de la dynamique de la bulle elle-même. Musk, l'"ami" de Trump, ne pourra pas voir les actions Tesla se déprécier parce que BlackRock les vend. En ce sens, à travers la relation avec la Chine et l'élection présidentielle américaine, c'est une véritable guerre qui se joue au sein du capitalisme financier "étoilé". 

Une chose est sûre, la Chine a déjà gagné sa bataille, et le sort de l'Occident dépend désormais de la volonté du Parti communiste chinois d'accepter la survie du capitalisme, quitte à ce que certains de ses grands actifs soient rémunérés par les "Big Three" eux-mêmes. A court terme, le Plenum chinois pourrait accepter une telle médiation afin de prendre le temps du remplacement définitif de l'empire américain, qu'il a d'ailleurs déjà entamé en se débarrassant de la dette américaine et en menant la répétition générale de la construction d'une solution monétaire autre que le dollar. Bien sûr, dans tout cela, l'Europe d'Ursula von der Leyen et de Christine Lagarde ne se préoccupe que de la construction de la "forteresse" contre les migrants et d'un green deal confié aux fonds américains.

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